Historique

1845 - Les origines

Le département Optique de l’Institut FEMTO-ST porte ce nom depuis 2004, mais son histoire remonte à bien plus loin. Son ancêtre, le Laboratoire de Physique Générale, était organisé autour de la chaire de physique de l’Université de Franche-Comté… une chaire créée en même temps que la faculté des Sciences de Besançon, en 1845.          

L’histoire de la faculté des Sciences de Besançon commence par un faux départ : inaugurée en 1810, elle ne fonctionnera que cinq ans avant d’être fermée faute de moyens. La réouverture définitive attendra 1845. [1]

En 1856, on trouve les premières traces de travaux d’optique avec l’arrivée de Jean-Antoine Quet (1810-1884), qui étudie la diffraction. [2, 3]

Photo d'un banc d'optiquePhotographie d'un banc d'optique, collection du département Optique de FEMTO-ST. © Jeanne Magnin et Morgan Gallois / Université de Franche-Comté

Jusqu’au milieu du XXe siècle, la faculté des Sciences reste une très petite structure, située au centre-ville de Besançon dans des locaux modestes. Un enseignant par discipline, assisté d’un préparateur, suffit pour les quelques dizaines d’étudiants. Pour la plupart, ces enseignants ne restent pas longtemps : en 1886, le doyen de la faculté « regrette de voir les professeurs faire d’ordinaire un séjour si court que la faculté de Besançon peut être considérée comme une faculté de passage ou d’attente ; il se défend d’ailleurs de faire aucun reproche aux collègues qui vont chercher ailleurs une meilleure installation ». [4]  Chacun d’entre eux, pendant les quelques années passées à Besançon, mène ses recherches dans un ou plusieurs domaines ; l’optique peut en faire partie, mais rien ne la distingue des autres champs de la physique.

1933 - Une première à Besançon

                                 

Image prise par JJ Trillat au microscope électroniqueMicrophotographie illustrant un article de J-J. Trillat [5]

En 1933, Jean-Jacques Trillat (1899-1987) [6] quitte l’équipe de Maurice de Broglie (frère de Louis de Broglie) pour la faculté des sciences de Besançon. Dans un court document autobiographique intitulé Some personal reminiscences, il se souvient :

« À Besançon, j’ai trouvé de vastes pièces vides où l’on n’avait même pas l’électricité. Au bout d’un an, le laboratoire a commencé à fonctionner, et j’y ai vécu heureux jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale. […] C’est là, en 1935, que nous avons construit le premier microscope électronique de France. ». [7]

Cette première nationale reste confidentielle, avec une seule publication par un assistant de Trillat [8], où aucune image produite par le microscope n'apparaît. Cela explique l'absence de publicité autour de cette avancée technique, oubliée par la plupart des ouvrages d'histoire des sciences. [9]

1960 - Un centre de l'Optique

En 1946, Pierre-Michel Duffieux (1891-1976) vient occuper la chaire de physique générale. Célèbre pour avoir posé les bases de l'optique de Fourier, il s'investit pour faire de Besançon « un centre de métrologie Optique ». [10]

Pour cela, il faudra avant tout de nouveaux locaux. À propos des salles dont il dispose, Duffieux écrit en 1960 : « Nous disposons comme laboratoire […] d’une ancienne cave abandonnée de tous, qui est trop courte, mal protégée contre les courants d’air et les inondations »... [10] Il organise alors le déménagement de son équipe vers le campus de la Bouloie. Les nouveaux bâtiments, plus grands et mieux adaptés, permettront ensuite des développements en physique des lasers et en holographie.

Photographie d'un laser Metrologics, modèle 410
Photographie d'un laser modèle 410 de Metrologic Instruments, collection du département Optique de FEMTO-ST. © Jeanne Magnin et Morgan Gallois / Université de Franche-Comté

 

Un second chercheur, Jean-Charles Viénot (1930-2022 ), joue également un rôle déterminant. En 1960, ce jeune physicien retrouve sa région natale après un PhD à l’Imperial College. Très rapidement, il organise la fabrication d’un des premiers lasers académiques de France avec des chercheurs comme Jean Bulabois, Nicole Aebischer et Jacques Pasteur. [11] Encore une première technologique… pour une équipe de quatre chercheur(e)s, une ingénieure et deux techniciens. 

                            

Les différents noms du laboratoire de physique depuis 1960L'optique à Besançon de 1960 à nous jours

1960 marque le début d’une croissance rapide : les effectifs triplent en dix ans. Le groupe se structure et quatre thèmes principaux se dessinent, posant les bases des futures équipes de recherche. C'est notamment la période des premiers travaux de Claude Froehly en optique non linéaire. [12]

Des liens se créent ou se renforcent, d'abord avec le CNRS dès 1969, mais aussi sous forme de collaboration avec d’autres centres de recherche comme l'École polytechnique et l'Institut d'Optique de Paris, et avec des entreprises comme Cheval-Frères ou Djeva. 

En 1974, le Laboratoire d'Optique P. M. Duffieux (LOPMD) est créé sous la direction de Jean-Charles Viénot.

En 2004, le Laboratoire d'Optique P. M. Duffieux devient le département d'Optique, membre fondateur de l'Institut FEMTO-ST avec le CREST (Centre de Recherche sur les Écoulements, Surfaces et Transferts),  le LMARC (Laboratoire de Mécanique Appliquée R. Chaléat), le LPMO (Laboratoire de Physique et Métrologie des Oscillateurs) et le LCEP (Laboratoire de Chronométrie, Électronique et Piézoélectricité).

Le département Optique de FEMTO-ST développe ainsi, depuis de nombreuses années, un savoir-faire expérimental dans le domaine de l’optique et de la photonique. Ses contributions à la production de nouvelles connaissances sont riches et variées, et s’illustrent par des collaborations au niveau national et international avec des partenaires académiques et industriels, des publications scientifiques et des actions multiples à destination du grand public. On peut citer, par exemple, la mise en place d’une année internationale de lumière en 2015, puis de la définition du 16 mai comme la journée internationale de la lumière, à l’initiative du professeur John Dudley et sous l’égide de l’UNESCO.

Pour conclure, il est éclairant de reprendre mot à mot la remarque générale qui termine le courrier du Professeur Pierre-Michel Duffieux adressé au Professeur Jacquemain (1898-1994) en 1960 [10] : « Rien dans les laboratoires ou ateliers d’optique ne correspond à ce qui est normalement prévu dans les programmes pédagogiques. Mais cela rentre moralement dans ces programmes si l’on admet que l’enseignement supérieur est inséparable de la recherche. Des organismes industriels et le CNRS sont, je le sais, disposés à nous aider.
Mais tout le monde attend que l’Université et l’Enseignement supérieur fassent honnêtement et résolument leur part. »

En à peine 3 phrases, Pierre-Michel Duffieux résume des décennies d’évolution et de transformation toujours en cours de nos universités, tout en pointant les liens essentiels et incontournables que doivent entretenir la recherche, la formation et l’innovation dans l’enseignement supérieur. C’est un sujet toujours d’actualité, qui préoccupait déjà nos collègues en 1960 ! Toutefois, c’est un héritage précieux que le département Optique continue à cultiver et à revendiquer encore aujourd’hui avec, pour exemples, la mise en place du master international PICS au sein de la Graduate School EIPHI et le Cursus Master en Ingénierie PICS.

   

   

   

1 - L'université de Besançon. In: Revue internationale de l'enseignement, tome 87,1933. pp. 173-179; https://www.persee.fr/doc/revin_1775-6014_1933_num_87_1_8337
2 - J-A. Quet, Sur un phénomène nouveau de diffraction et sur quelques lois de la diffraction ordinaire, Annales de chimie et de physique, 3ème série, t.XLVI (avril 1856), pp. 385-414, source gallica.bnf.fr
3 - J-A. Quet, Diffraction de la lumière produite par une fente très-étroite, Annales de chimie et de physique, 3ème série, t.XLIX (avril 1857), pp. 385-428, source gallica.bnf.fr
4 - Chronique de l'enseignement. Revue internationale de l'enseignement, tome 13, Janvier-Juin 1887. pp. 176-186;
https://www.persee.fr/doc/revin_1775-6014_1887_num_13_1_2154
5 - Jean Jacques Trillat, Art, Aesthetics and Physics: The Contribution of Physics to Modern Art, Leonardo , Jan., 1970, Vol. 3, No. 1 (Jan., 1970), pp. 47-54, The MIT Press, url: https://www.jstor.org/stable/1572051
6 - Jean-Jacques Trillat, Roger Merigoux. Recherches sur la libération d’argent dans l’émulsion photographique. J. Phys. Radium, 1936, 7 (12), pp.497-502. ff10.1051/jphysrad:01936007012049700ff.ffjpa-00233459f
7 - Jean Jacques Trillat, Some Personal Reminiscences, extract from 50 Years of X-ray Diffraction, First published for the International Union of Crystallography 1962 by N.V.A. Oosthoek's Uitgeversmaatschappij, Utrecht, The Netherlands
8 - R. Fritz (1936). Le microscope électronique, principe, réalisation et emploi. Revue Générale des Sciences Pures et Appliquées 47, 338–342
9 - P. W. Hawkes, Trillat-Fritz : a very early electron microscope, Revue Universelle des Mines, 2013, url : 9ae871bf-2ee7-4fbd-b22ea9f39fd4e2ed.pdf (pixl8-cloud-rms.s3.eu-west-2.amazonaws.com)
10 - Rapport sur les laboratoires isothermes et isobares demandés par les services de Physique, courrier du Professeur P.M. Duffieux au Professeur Jacquemain, 15 mars 1960, archives du département Optique de FEMTO-ST
11 - Jean-Charles Viénot, Nicole Aebisher et Jean Bulabois « Sur la détermination de la largeur de la raie R1 (λ=6943 Å) émise par un laser à rubis. », CRHSAS 254, 1596 (1962)
12 - Jean-Charles Viénot et Claude Froehly, « Interprétations des phénomènes liés à l’émission du second harmonique dans un cristal non-linéaire excité par la raie R1 d’un laser à rubis », CRHSAS, 261, 1, 91-, séance du 28 juin 1965.