Optique

photo d'un appareil de HookePhotographie d'un appareil de Hooke fabriqué par la maison Soleil entre 1825 et 1850, collection du département Optique de FEMTO-ST.

              

Au cours du XIXème siècle, l'optique, ou étude de la lumière, connaît des progrès importants. Thomas Young (1773-1829) en 1801, puis Augustin Fresnel (1788-1827) quinze ans plus tard, défendent la théorie ondulatoire de la lumière : les rayons lumineux sont des ondes, des vibrations qui se déplacent dans l'espace.

Cette théorie finit par faire consensus dans la communauté scientifique de l'époque. Elle permet d'expliquer différents phénomènes qu'on observait depuis longtemps sans les comprendre : par exemple une étrange propriété de certains cristaux, qui sont capables de séparer en deux les rayons qui les traversent. Ce phénomène est dû à une propriété des ondes lumineuses : la polarisation, découverte au XVIIème siècle et expliquée par Augustin Fresnel en 1821. [1] 

              

À la fin du XIXème siècle, il reste encore beaucoup à faire pour tout comprendre sur la polarisation de la lumière. Paul Joubin et Jules Chaudier, deux chercheurs qui passeront une partie de leur carrière à Besançon, s'intéressent à cette question. 

Paul Joubin (1862-1941)

  

Paul Joubin commence sa carrière en tant que préparateur de physique au Collège de France. En 1890, il arrive à la faculté des sciences de Besançon dont il devient le doyen en 1900, avant d’être nommé à Chambéry en 1902. Dans ses recherches, Joubin étudie principalement l’électricité et les interactions entre lumière et ondes électriques, mais aussi la mécanique. [2] Lors de sa thèse, il s’intéresse à un effet des champs magnétiques sur la lumière : la rotation de polarisation. Il cherche à tester expérimentalement une formule permettant de calculer cette rotation, postulée par Eleuthère Mascart (1837-1908), un physicien reconnu.

Pour cette étude, Joubin utilise un appareil de Nörremberg. Cet outil lui permet de produire une lumière polarisée à partir de lumière ordinaire. Il peut ensuite fixer un échantillon de la substance qu'il veut étudier sur l'une des colonnes de l'appareil, afin que la lumière polarisée le traverse. Enfin, la lunette d'observation lui permet d'analyser la lumière après qu'elle ait traversé l'échantillon, c'est-à-dire de mesurer un éventuel changement dans la polarisation.

Joubin se sert également d'un spectroscope, qui lui sert à observer le spectre lumineux du rayon sortant de l'analyseur. Il se demande si, en plus de modifier la polarisation de la lumière, la présence d'un champ magnétique a également un effet sur sa longueur d'onde. Le spectroscope lui servirait à détecter un tel changement, s'il y en avait un.

L'appareil de Nörremberg

Cet appareil de Nörremberg, fabriqué par la maison Soleil, est composé (de haut en bas) :
- D’une lunette d’observation liée à un limbe gradué
- D’un disque gradué pouvant se fixer à différentes hauteurs sur les colonnes. Il soutient une lentille de verre.
- D’une glace sans tain mobile autour d’un axe horizontal
- D’une glace étamée fixe et horizontale, surmontée d’une lentille
- D’un tiroir dans lequel sont rangés les accessoires de l’appareil : trois lentilles, un fond noir, et une feuille en plastique transparent.
Cet appareil permet d’étudier les couleurs produites par les rotations de polarisation de la lumière. La glace sans tain joue le rôle de polariseur et la glace de verre noir d’analyseur.

Photo de l'appareil
Photographie d'un appareil de Nörremberg fabriqué par la maison Soleil entre 1825 et 1850, collection du département Optique de FEMTO-ST. © Jeanne Magnin et Morgan Gallois / Université de Franche-Comté

Schéma de l'appareil
Schéma de l'appareil de Nörremberg

Extrait de l'article
Extrait de l'article : Sur la dispersion rotatoire magnétique [3]

 

Le Spectroscope

Schéma du spectroscope
Schéma d'un spectroscope fabriqué par la maison Jules Duboscq et Ph. Pellin entre 1875 et 1900, collection du département Optique de FEMTO-ST

             

Ce spectroscope est composé :
- D’un collimateur pour rendre parallèles les rayons qui tombent sur les prismes
- De deux prismes surmontés d’un couvercle qui les protège de la lumière extérieure
- D’une lunette qui peut tourner autour des prismes de manière à observer toutes les couleurs du spectre lumineux.
- D’un micromètre donnant un repère pour les différentes positions du spectre.
Cet instrument sert à étudier la décomposition de la lumière par des prismes. Pour cela, le micromètre est éclairé par une bougie et la source de lumière à analyser est disposée devant le collimateur.

Jules Chaudier (1865-1932)

En 1909, Jules Chaudier étudie également la rotation de polarisation. Il cherche à mesurer la rotation qui se produit lorsque la lumière traverse une liqueur mixte, c’est-à-dire « constituée par l’association d’un liquide et de particules cristallines en suspension », sous l’influence d’un champ électrique.

Schéma de l'héliostatSchéma d'un héliostat de Silbermann fabriqué par la maison J. Duboscq entre 1875 et 1900, collection du département Optique de FEMTO-ST

Pour cela, il se sert entre autres d'un héliostat de Silbermann. Il s'agit d'un miroir tournant, actionné par un mécanisme d'horlogerie, qui permet d'utiliser les rayons du soleil comme source de lumière sans se préoccuper des changements de direction de ces rayons au cours de la journée.

Extrait de l'article
Extrait de l'article : Etude expérimentale des propriétés électro-optiques
des liqueurs mixtes [4]

    

    

   

Vidéo réalisée par le service Sciences, Arts et Culture de l'Université de Franche-Comté : découverte de l'héliostat de Silbermann avec Maxime Jacquot, Professeur en optique physique à l'Université de Franche-Comté, Institut FEMTO-ST

Et maintenant ?

    

Au XIXème siècle, la polarisation était un phénomène récemment découvert et assez mystérieux. Aujourd’hui, on comprend beaucoup mieux cette caractéristique de la lumière, qui est exploitée dans pratiquement tout les champs de l'optique. Par exemple, au département Optique de FEMTO-ST, plusieurs travaux ont été consacrés à de nouveaux composants (comme des fibres optiques) et à leurs influences sur la polarisation des ondes qui les traversent. 

    

   

   

1 - Chapert André, Histoire de l'optique ondulatoire : De Fresnel à Maxwell, 2007, Editions Belin, ISBN: 978-2-7011-3345-4
2 - Condette Jean-François, Les recteurs d'académie en France de 1808 à 1940. Tome II, Dictionnaire biographique.
3 - P. Joubin. Sur la dispersion rotatoire magnétique. J. Phys. Theor. Appl., 1889, 8 (1), pp.53-69. ff10.1051/jphystap:01889008005300ff. ffjpa-00239022
4 - J. Chaudier et Ch. Touren, Etude expérimentale des propriétés électro-optique des liqueurs mixtes, J. Phys. Theor. Appl., 1909, 8 (1), pp.422-440. ff10.1051/jphystap:019090080042201ff. ffjpa-00241470f